Le Premier ministre du Luxembourg, Xavier Bettel, est intervenu le 11 novembre lors de la séance d’ouverture du Sommet de La Valette sur la migration dans sa capacité de chef de gouvernement du Luxembourg qui exerce la Présidence tournante du Conseil de l’UE.
Lors de cette réunion, les chefs d'État ou de gouvernement de l'UE rencontrent leurs homologues des pays africains pour examiner les questions de migration. L'objectif du sommet est de souligner que les migrations relèvent de la responsabilité partagée des pays d'origine, de transit et de destination. Les discussions portent essentiellement sur les points suivants: s'attaquer aux causes profondes des migrations ; intensifier les travaux visant à promouvoir et organiser les voies de migration légales ; renforcer la protection des migrants et des demandeurs d'asile ; lutter contre l'exploitation et la traite de migrants ; améliorer la coopération en matière de retour et de réadmission.
Dans son intervention, Xavier Bettel a dressé le constat que "l’Europe connaît sa plus grande crise migratoire depuis la deuxième guerre mondiale". Et d’ajouter à l’adresse des chefs d’Etat et de gouvernement africains : " Il est important que nous nous rencontrions car nous nous trouvons actuellement à un carrefour critique où l’Union européenne se voit obligée de redéfinir sa politique de gestion des frontières, d’accueil de migrants et de réfugiés, tout en restant fidèle aux valeurs de l’Union et qui nous nous définissent comme Union. L’Europe souhaite rester ouverte et garder ses valeurs comme maximes."
Pour Xavier Bettel, "il nous faut trouver un équilibre entre les impératifs humanitaires qui nous interpellent tous et le besoin d’engager des réflexions plus approfondies sur les réponses que nous devons formuler, à moyen et à plus long terme."
Il a évoqué les "crises politiques à nos portes" et la nécessité "d’anticiper ensemble les grandes tendances du 21e siècle". Il a nommé l’évolution exponentielle de la démographie, la performance des télécommunications qui accélère la mobilité, l’exode rural et la concentration des populations dans les villes et le changement climatique. Pour le Premier ministre, face à ces défis "nous devons trouver une solution durable, et nous ne pouvons pas le faire les uns sans les autres".
Il a plaidé pour "un dialogue ouvert, franc et régulier", pour la confiance mutuelle, pour l’approfondissement du partenariat avec l’Afrique dans le futur, et dès décembre dans le cadre de la COP21.
Il a aussi souligné que "les relations entre nos deux continents ne peuvent se construire sur une migration illégale ou irrégulière, qui existe au détriment des droits fondamentaux de vos citoyens et qui ne fait que principalement enrichir les réseaux de passeurs et trafics humains".
Il a aussi décrit le risque que cette migration illégale ou irrégulière "provoque chez nous la montée de ceux qui prônent l’exclusion qui touche d’abord vos concitoyens, ce qui risque par après de provoquer une réponse dont personne ne veut autour de cette table par rapport à la migration en général". Bref, il faudrait trouver une solution à la question de la migration qui aille "dans les deux sens".
Xavier Bettel a ensuite évoqué le fait que sur 10 migrants, 8 viennent de pays en voie de développement. Il a reconnu que des budgets élevés en faveur de la coopération n’étaient pas populaires dans l’UE et que les élus ont des difficultés à les justifier devant leurs électeurs. Pourtant, a-t-il estimé, les problèmes que la plupart des Européens rencontrent sont "des problèmes de luxe" comparés à ceux, vitaux, qui se posent aux populations en Afrique. "Donner 1 % de son Revenu National Brut pour son Aide Publique au Développement n’est pas un luxe mais un devoir", a-t-il lancé.
Il pour lui "important d’investir dans les gens, de donner de l’espoir aux jeunes générations qu’elles puissent suivre une éducation et avoir des perspectives, car si les jeunes quittent leurs pays, c’est parce qu’ils n’ont pas de perspectives." Pour lui, donner des perspectives, c’est à terme prévenir des conflits et leur éviter de tomber dans l’extrémisme et le terrorisme. "Je préfère investir dans les gens plutôt que dans les armes", a-t-il encore dit, avant d’annoncer "la contribution de mon pays au Trust Fund à hauteur de 3, 1 millions d’euros".
Xavier Bettel a exprimé son espoir que le lendemain, le Sommet soit en mesure d’adopter des conclusions communes, car il serait difficile d’expliquer un échec aux citoyens européens.
Il a conclu par un appel aux chefs d’Etat et de gouvernement africains : "Vu l’ampleur du défi qui nous attend, l’aide humanitaire et de développement ne saurait toutefois suffire pour répondre aux attentes de cette jeunesse africaine qui bouillonne d’espoirs et d’ambitions. Ils sont près d’un 1 milliard aujourd’hui, demain, ils seront deux milliards et après-demain, ils seront 4 milliards. La réponse qu’ils attendent repose entièrement entre vos mains souveraines et nous Européens, nous ne pouvons que vous aider dans la réalisation de vos efforts."